Troisième partie : LE BESOGNÉ DE BERSILLIES-l'ABBAYE.
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Le Besogné de Bersillies

Le berceau de la famille est à Crouy, petit village picard au Nord-Est de Soissons. En 1453, Antoine de Croÿ reçoit de Philippe III de Bourgogne le territoire de Beaumont et ses villages avoisinants.
Nous savons que Bersillies-l'Abbaye n'en fit partie réellement que plus tard, par son achat le 31 janvier 1519, date à laquelle Charles Quint érigea la terre de Beaumont en comté en faveur de Guillaume de Croÿ

Philippe III de Bourgogne

Il y eut ensuite les successions de Philippe I de Croÿ (1475 1511) , de Henri de Croÿ (1511 1514) puis de Guillaume son frére (1514 1521). La terre passe ensuite au comte Philippe II de Croÿ (1521 1549) , son fils an Charles II (1549 1551) , au frére de ce dernier, Philippe III de Croÿ (1551 - 1595) puis à son fils Charles III, nommé grand bailli de Hainaut en 1593, de 1595 - 1612.

Charles III de Croÿ naquit à Beaumont le 1er juillet 1560, de Philippe III de Croÿ, troisiéme duc d'Aerschot et de Jeanne de Halluin, dame de Comines et de Halluin.

Charles III de Croÿ

A l'âge de neuf ans il fut envoyé à Louvain pour y faire ses humanités et acquérir ses grades académiques. Il se passionna pour les lettres auxquelles il resta très attaché toute sa vie. A l'âge de 20 ans, sur les conseils de son père, il épousa en 1580 Marie de Brimeu, comtesse de Meghem, veuve de Lancelot de Berlaymont, son aînée de dix ans, qui lui apporta de nombreux fiefs du Comté d'Artois, de Picardie, du duché de Brabant et de Luxembourg. (voir la généalogie de la Famille de Croÿ en cliquant sur le portrait)
A la mort de son père, le 11 décembre 1595, il hérita de nombreux domaines parmi lesquels on compte le duché d'Aerschot, la principauté de Chimay, le comté de Beaumont et les seigneuries d'Avesnes.
En 1598, à la signature du Traité de Vervins, il devient le premier Duc de Croÿ.
Après la mort de sa femme dont il vivait séparé à Beaumont depuis 1584, il épousa en 1605 sa cousine Dorothée de Croÿ, fille aînée de Charles Philippe, marquis de Havré et châtelain de Mons. Il mourut dans son château de Beaumont le 12 juin 1612 en léguant à son neveu, Alexandre d'Arenberg et à sa postérité non seulement une collection admirable de quelque 2.500 gouaches réalisées par le peintre Adrien de Montigny originaire de Valenciennes, mais aussi de nombreux " Besoignés ", véritables inventaires des ressources des villes et villages de ses propriétés, qu'il fit confectionner par son secrétaire François Liénard

Bersillies faisait partie de cet inventaire, c'est pourquoi nous avons actuellement un cliché incomparable de la vue de ce village en 1608. (Biblio. n°16)

" Le Villaige de Bersiglie " peint vers 1596-1598 par Adrien de Montigny.
Planche n°75 et commentaire du 1er album de Croÿ, édition du Crédit communal de Belgique.

AQUARELLE de Croÿ

Voici une partie du commentaire écrit par Cécile DUMONT à propos de cette planche :

" De la petite église en pierre qui apparaît ici, rien n'est demeuré. L'édifice a été reconstruit à deux reprises, au XVIIIe et XIXe siècle. Bersillies comptait une quarantaine de maisons disperses, mais nous n'en voyons que dix sur la gouache. Certaines de ces maisons étaient en pierre, d'autres en terre battue, et pour les toits, on se contentait le plus souvent de chaumes. On employait assez rarement les assis, couvertures de bois fort utilisées au sud de Beaumont. Il n'y avait pas de tuiles malgré la présence d'une tuilerie dans les environs, et seule l'église bénéficiait d'une toiture d'ardoises. Lorsque l'on compare entre elles les gouaches d'Adrien de Montigny, on peut observer quelques différences dans les constructions. Ainsi est-il probable que la seconde masure représentée à gauche soit faite de bois. Des détails, en tous cas, trahissent la pauvreté de ce village rocailleux. "

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Bersillies-l'Abbaye en 1608.

En 1608, Bersillies comptait 40 maisons, et ce village pouvait fournir alors 35 hommes en état de porter les armes.
En effet, en ce début de XVIIe siècle, on recensait 14 laboureurs. Certains de ceux-ci possédaient au moins une charrue, des terres labourables et souvent une étable et une grange. Dans la description qu'en donne le besogné de cette époque, le village, situé sur la rivière venant du moulin de Frazies village situé au nord de Sivry)) est entouré de deux " montagnes " : l'une, boisée, est appelée le Bois de la Halle, vers Cousolre, et l'autre, boisée également, est nommeé Bois de Beumont, vers Solre-sur-Sambre.
Alors que la plus grande partie du territoire de Bersillies appartenait à la très illustre famille de Croÿ, qui le conserva de génération en génération et sur lequel elle exerçait les droits de haute, moyenne et basse justice, quelques fiefs relevaient de la cour féodale de Hainaut à Mons, d'autres de l'autorité du comte de Barbençon.
Le trois juillet 1596, tous les habitants de Bersillies allèrent en arme à la rencontre de Charles de Croÿ, à 'loccasion de sa joyeuse entrée à Beaumont. Ils l'accueillirent par une salve d'arquebuse " une fort belle décharge de coups dharquebuse " ) et l'accompagnèrent vers l'église de Beaumont où un " Te Deum " fut chanté et ensuite vers son château en " sonnant et triboulant les cloches ". Ce fut sans aucun doute une journée faste qui est restée dans la mémoire des foyers!

SCEAU de Bersillies
Sceau échevinal de la famille de Croÿ-Renty utilisé à Avesnes, Acren St Géréon, Bersillies-l'Abbaye, Dompierre, Ferrière-la-Grande, Havré, Ghlin, Leval sous Beaumont, et beaucoup d'autres fiefs de la famille.
SCEAU de Bersillies

Aux trois fasces de la famille de Croÿ s'opposent trois doloires dont la deuxième est contournée. L'écu est couronné et entouré du collier de la Toison d'or. Sa légende, pour celui de Bersillies-l'Abbaye est : " S. de Berselie labie "Ce sceau servait pour les échevinages de plusieurs tenances à Bersillies et notamment pour la seigneurie " condist de Madame Sainte Renfroye " et provenant de chirographes des 6 mars 1543 et 12 juin 1545.

" Document et dessin de Monsieur Claudy Lempereur.

L'administration du village était confiée à un mayeur et sept échevins : le premier était nommé et révocable par le Seigneur Haut Justicier du village, les échevins ("scabini") étaient renouvelés chaque année par le Seigneur ou par son délégué. Ils prètaient serment à leur entrée en fonctions.
Les échevins étaient assistés d'un greffier et d'un massard; celui-ci devait rendre compte chaque année de sa gestion aux mayeur et échevins.
L'énumération des responsabilités attribuées aux mayeurs dans l'exercice de leur fonction à cette époque nous est donnée par l'intermédiaire d'un document concernant la nommination du mayeur Jean WIART par l'écuyer Philippe de la Biche, seigneur de Cerfontaine, gouverneur et prévôt de la ville et du comté de Beaumont.

Le mayeur est tenu d'appréhender, d'arrêter et d'emprisonner tout malfaiteur et son bétail dès qu'il aura la connaissance d'un méfait commis par celui-ci. Il lui appartient de recevoir tous les gages et toutes les amendes en argent ou en nature, redevables par les contrevenants.
Il est chargé de tous les rapports concernant les héritages, les mains-mises, les recours en justice, et aussi les épaves, les mortes-mains (droit de protection moyennant un impot prélévé lors d'un décès de chef de famille, par exemple). Il a la responsabilité de nommer des échevins, sergents, massiers, de les semoncer s'il y a lieu et de les conduire au Chef-lieu si cela s'avère nécessaire. Enfin, il est tenu, généralement et tout spécialement de faire exercer, besogner et exploiter tout ce que son état de mayeur lui commande dans l'application de la loi du Hainaut.

D'après Théodore Bernier, il n'existe à Bersillies plus aucune pièce des archives de la commune antérieures à 1800. Les anciens titres ont été détruits à l'époque de la révolution française.
En principe, on suivait dans la commune les coutumes générales du Hainaut sans aucune dérogation. Les publications des placards et ordonnances se faisaient par les soins du mayeur, en présence des échevins, le dimanche après la messe paroissiale, sous un grand tilleul planté non loin du cimetière qui, jusque 1895, entourait l'église. Dans celui-ci on trouve encore aujourdhui de rares monuments funéraires dont celui de Julien Philippron , décédé à l'âge de 83 ans, le 7 mai 1879. Il fut bourgmestre de Bersillies pendant 29 ans.
On y trouve égalemnt la tombe de Hubert-Désiré-Joseph Roullie, décédé à 73 ans, le 2 mai 1863. Il fut instituteur et clerc-laïc du village de 1812 à 1852.

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Les écoles communales.

Il y avait à Bersillies-l'Abbaye en 1608 une école construite en pierre et recouverte d'un toit de chaume, dans laquelle enseignait le clerc de la paroisse qui y accédait depuis la cure par une petite porte. Figurant encore sur le plan Popp à la rue de Cousolre, Ecole de la rue du moulin elle fut remplacée au XIXe siècle par une école pour filles et garçons aux n°21 et 23 de la rue du moulin et dont on voit encore actuellement la trace. A la fin de ce siècle, celle-ci fut finalement transférée dans une partie de l'hotel communal construit en 1898 du temps de Pierre Mahieu, et où elle est encore actuellement. De nombreux instituteurs s'y sont succédés jusqu'à présent, et parmi ceux-ci on peut relever Monsieur Léopold NAVEZ (1884 - 1920), Madame Lydie MICHAUX-MEURANT (1909 - 1937), Madame Marie Louise MERCIER-CARLIER (1937 - 1963), Monsieur Alfred MATIS (1920 - 1945), Monsieur Willy ADNET (1938 - 1967), Madame LORGE-MONFILS ( 1919 - 1954), Madame Alberte DECAMP-BLAVIER (1954 - 1966), Monsieur Claude HERMANT (1967 - 1977), dont on trouvera quelques photographies de classes dans une annexe qui leurs est consacrée.

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La vie à Bersillies au XVIème siècle.

Les habitants avaient le droit de faire paître (champier) leurs bestiaux sur les prairies nommées Dessous-la-Ville , Mon frère et Du Chesnois, après l'enlèvement de la premirèe dépouille des foins. Un règlement fut arrêté en juillet 1571 par le grand bailli de Hainaut pour l'exercice de ce droit; il est reproduit intégralement dans le besogné et donne une bonne image de l'administration du village à cette époque. En voici quelques extraits traduits en français :

Règlement donné sur le " champiage" par feu son Excellence.

Etant donné la petite surface occupée par le territoire de la ville de Bersillies-l'Abbaye, les bourgeois, paysans et habitants de cette ville ne pourront posséder plus de quatre-vingts bètes chacun, cent dix pour ceux qui détiennent deux charrues, sous peine de confiscation du bétail excédentaire, assortie d'une amende de quatre livres tournois à répartir de la manière suivante: un quart au Roy, un autre quart au seigneur, autant à la ville et un quart au dénonciateur. Chacun sera tenu de faire connaître l'endroit où hiverne son bétail et de le faire marquer par un préposé qui recevra le salaire d'un denier par bête marquée.Les bètes devront être présentées entre le levé et le couché du soleil si le temps le permet. Elles ne pourront aller paître dans les prés, les bois et sous-bois, les garennes, marais et terrains vagues en quelque saison que ce soit sauf dans les marais par delà leau, les terrains vagues et prés d'Autremont, du jour de la Saint Remi (15 janvier) aux premiers de Mars, à condition qu'aucune bète ne soit malade ou que son propriétaire force son engraissement à son plus grand profit.Il est décidé et arrêté qu'aucuns héritiers, fermiers et laboureurs, femmes et enfants ni même les pauvres et les étrangers ne pourront moissonner, ni glaner tant que les dépouilles des champs ne soient emportées ou du moins rassemblées en tas ou en monts. Personne ne pourra mettre en pâture ses bêtes sur un champ recouvert de paille avant les 23 heures suivant le charriage et le transport des récoltes. Est interdit à tous également de faire paître ses bêtes si le champs mitoyen n'est pas récolté, même s'il en est propriétaire. Il est absolument défendu de posséder des moutons, chèvres, oisons, de couper, élaguer les haies, tant l'hiver que l'été, sous peine d'enfreindre les lois dictées par la charte générale du pays et d'être puni. Les cochons pourront être mis en pâture dans les terrains vagues situés en deça du ruisseau de la fontaine (source) appartenant Guillaume Dumont et jusqu'au pont de pierre de la rivière et nulle part ailleurs. Ce règlement a été agréé pour être inviolablement suivi sous peine d'amendes, par Monsieur Noircarmes, grand bailli du pays de Hainaut à Mons, en juillet 1571.


Comme on le voit, les ressources du village étaient peu abondantes et par conséquent très règlementées. Elles consistaient en rentes, en quelques héritages et dans le produit de la vente des coupes des bois, nommés Bois de la Ville (Bois de Bersillies) et Bois du Perroy (Bois de Payreu), propriétés de la commune.

A la suite d'une revendication exprimée par le mayeur, les échevins, les manants et les habitants de Bersillies-l'Abbaye, Philippe de Croÿ, comte de Beaumont, sensible aux arguments exposés, promulgue le 3 aout 1566, non sans une certaine forme d'humour, une ordonnance au sujet des bois de ce village. Il s'agissait en l'occurrence de permettre aux habitants de compenser les pertes occasionnées par les dernières guerres et les charges imposées au village par ces conflits. Dans sa réponse le comte souligne que :


" ne sachant trouver moyen plus convenable pour remédier à la situation que de garder à leur usage le franc bois d'une haie de leur aizement communment appelée " le bois du Perroy " , d'une surface d'environ 20 boniers, ce que bonnement les habitants n'oseraient faire, sans sur cela obtenir notre grâce et consentement, nous inclinant favorablement leur requête, considérant celle-ci raisonnable et désirant soulager nos manants autant que cela soit possible, avons de bon gré consenti, accord, agréons, consentons et accordons l'autorisation afin qu'ils puissent clore, fermer et garder ces bois, les dire francqs de telle manière et façon que personne, de quelle qualité ou condition qu'elle soit, n'y puisse prétendre aucun droit comme aizement et ce, sur semonce, peines, loix et amendes introduites pour leurs autres bois qu'on dit d'Elle-Ville, et conséquemment comme tous autres francqs-bois, affin que, celuy estant venu en aige, on puisse tirer et faire proffit de la raspe (taillis) et despoulle pour décharger les arrérages par eux deus.
Ainsi fait en la ville de Bruxelles, le troisième jour d'aoust 1566,
Soubscript : Philippe de Croÿ

Jean Baptiste Pocquelin dit Molière n'était pas encore né, mais le décor était déjà planté!.

Le territoire de Bersillies-l’Abbaye était partagé entre plusieurs fiefs. Les uns relevaient directement de la cour féodale de Hainaut à Mons, d'autres étaient mouvants des comtes de Barbençon. En outre, ainsi que nous l’apprend le besogné, les comtes de Beaumont possédaient, faisant partie de ce comté, la majeure partie du village avec droit de haute, moyenne et basse justice.

Parmi les fiefs relevant de la cour de Mons se trouvait une seigneurie assez importante, fief ample comprenant en 1410 des terres, prés, une partie de bois, plusieurs cens et rentes, avec justice foncière. Les possesseurs primitifs sont cités dans plusieurs titres de la période féodale. En 1410, ce fief appartenait à Colins de la Glizoelle, fils de Huart. Micquelet Mauret le possédait en 1474. Au commencement du XVIIe siècle, ce fief fut acquis par Philippe Lambert et transmis à Philippe Le Molnier, ou Mosnier, bourgeois de Mons, qui le reçut de sa femme Jeanne Lambert. Jean de Trahegnies, aussi bourgeois de Mons, en fit l'acquisition un peu plus tard. Son frère Adrien de Trahegnies en hérita et le transmit le 17 septembre 1639 à Thomas de Trahegnies, seigneur de Genly, qui le conserva jusqu’au 24 décembre 1668. Il passa ensuite à Marie-Magdeleine de Trahegnies, épouse Leduc, qui décéda le 29 octobre 1690. Son fils, Thomas-François Leduc le passa, le 23 octobre 1691, à Philippe-Thomas Leduc qui mourut sans descendance le 6 septembre 1743. Son cousin germain Baudouin Le Roy, écuyer, demeurant à Mons hérita de ce fief nommé communément, dit l'acte d’acquisition du 29 novembre 1743, le fief et Seigneurie de Bersillies. Son fils, Antoine-Siméon Le Roy, écuyer, greffier de la police de la ville de Mons, le recut le 31 août 1743 ; il avait épousé Marie Thérèse de Wolff et mourut le 26 octobre 1782, laissant trois filles mineures. L'une d'elles, Charlotte Françoise Le Roy, le reçut à sa majorité, le 14 février 1788.

Un autre fief important, nommé au siècle dernier le fief de Misselet parce qu'il était dès 1609 la propriété d'une famille Misselet ou Michelet de Bersillies, comprenait cinq boniers de terre (environ 4 hectares). Gilles Prévost en fit l’acquisition le 5 mars 1706.

Un fief de quatre journels (4 fois 1/3 d’hectare, donc 1 hectare 30 ares) de pâture dans lequel existait " une tour masurée nommée ci-devant la tour de l'Abbaye avec quelques autres masures contenant un journel " , fut acquis pour la somme de 760 livres tournois par Etienne Boucqueau, mayeur de Bersillies, de Robert de Brielle, en 1556. Jean Hanoys le possédait en 1706.

Enfin un autre fief comprenait le tiers des grosses et menues dîmes levées à Bersillies, les deux autres tiers se partageant entre l'abbaye de Saint-Ghislain et le curé du lieu. Maighe de Flauchin, bourgeoise de Mons, le possédait en 1410. Vincent de Peissant, en 1473. Anne de Trouille le laissa, à sa mort survenue le 7 septembre 1586, à Charlotte de Cuinchy, sa fille; celle-ci n'ayant pas eu d'enfant de Jean de Neve, dit de Wordes, son mari, ce fief passa en 1611 à Jeanne, sa sœur. Le 2 mars 1612, Jeanne de Cuinchy s'en déshérita au profit de Nicolas Ghodemart, bourgeois et marchand demeurant à Mons, à qui elle l'avait vendu. Cette famille le possédait encore à la fin du XVlIe siècle.

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Les églises et la paroisse de Bersillies-l’Abbaye.

La paroisse de Bersillies dépendait du diocèse de Cambrai et du décanat de Maubeuge. Depuis le concordat de 1803, elle passa au doyenné de Merbes-le-Château puis au doyenné de Solre-sur-Sambre dépendant du Diocèse de Tournai. La collation de la cure ainsi que la dîme de Bersillies appartenait à l'abbaye de Maroilles. Ce bénéfice avait été donné en 956, par le roi Lothaire 1er, à Hansart, son médecin, pour en jouir toute sa vie, à condition qu'il retournerait, à la mort du donataire, aux moines de l'abbaye de Maroilles. Il en fut ainsi jusqu’en 1716.

Le besogné nous donne une description très précise de l’église paroissiale en 1608.

Église paroissiale.
"Il y at audit Berseillies-l'Abbaye, une église parochialle avec une tour quarée et une vaussure et clocher au-dessus, estant le tout basti de pierres de taille, y ayant deux cloches faictes et entretenues aux fraix des manans dudit lieu, mais n'y a horloge, quadran ny montre."

La vielle église

Détail de la planche n° 75, issue du 1er album des planches (2ème partie)

Le chœur de l’église est entouré d’une clôture de bois " d’escrignerie " (de chêne) et chevillée à un grand autel dédié à Saint Martin et à Sainte Barbe, patrons de la paroisse. Au niveau de la table d’autel, sont sculptées dans le bois les images des douze apôtres. Il est surmonté d’un Christ en croix. A cet autel, au dire de Jean Maréchal, curé de la paroisse, n’est attachée aucune fondation, mais la charge de célébrer la messe le Dimanche et les jours de fête. A gauche de l’autel, en entrant, une niche dans la muraille, fermée d’un treillis peint en rouge, reçoit le reposoir du St Sacrement.

Ce chœur est entouré de bancs à coffre, où sont entreposés les ornements de l’église. Du côté droit, un lutrin (estapleau) invite aux chants les curés, clercs et autres gens d’église. Il y a aussi un pupitre transportable pour y chanter l’épître et l’évangile.

La nef de l’église est soutenue par quatre piliers de pierre de taille blanchie et lambrissée comme le chœur. Sur la clôture et à l’entrée du chœur, se dresse un ensemble, taillé dans le bois, formé d’un crucifix et des images de la vierge Marie et de St Jean. Devant lui, pend une lampe de cuivre, allumée par le manbour pendant les offices. Sous celle-ci, se trouve l’image de Saint Martin ainsi qu’une belle et grosse chandelle, faite et entretenue par les aumônes du peuple, et allumée pendant les offices des fêtes et des dimanches.

Dans l’église actuelle, se trouve également une attachante statue de bois polychrome figurant Saint Hubert entouré d’un chien très expressif et d’un cerf dont les bois sont ornés d’un Christ en croix. St Hubert On sait que le saint, patron de la chasse,des chasseurs et des Ardennes, était aussi invoqué préventivement contre la rage. Le pain de St Hubert est en effet béni chaque année le 3 novembre. Il n’y a malheureusement pas d’archives concernant l’origine ou l’histoire de ces attachantes statues datant vraisemblablement du XIXème siècle.

St Martin

Les fonts baptismaux sont placés à gauche en entrant dans l’église. Ils sont formés d’une coupe de pierre de taille, soutenue par un pilier de même pierre et garnie de cuivre blanchi, couvert de bois.
La chapelle Notre Dame est également à gauche dans la nef, blanchie comme elle, formée d’une table peinte et d’images de Sainte Anne et de Notre Dame, sculptées dans le bois. Devant cet autel, est une grosse chandelle allumée et entretenue par les jeunes filles les jours des offices. Du côté droit de la nef se trouve la chapelle de Sainte Barbe, patronne de l’église, également blanchie, qu’a fait édifier un Sieur de Peissant, ainsi que l’attestent les vitraux de cette chapelle.

Le statuaire de l'église actuelle.

Sainte BrigideSainte Bernadette Ste RitaLa Vierge des lumières

sainte Brigide                  sainte Benadette                 sainte Rita                      La Vierge des Lumières

Saint JosephSainte Catherine Notre DameSaint Nicolas

saint Joseph                     sainte Catherine               Notre Dame                  saint Nicolas
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Dans cette très ancienne église, à gauche dans la nef, blanchie comme elle, se trouvait la Chapelle Notre Dame formée également d’une très vieille table de bois peint et des images, taillées dans le bois, de Sainte Barbe, Sainte Catherine, Sainte Marguerite et Saint Roch.
Toute l’église, le chœur, la nef et les chapelles sont illuminées de neuf verrières blanches exceptées celle de la chapelle Sainte Barbe qui est ornée des armoiries et de l’effigie du Sieur de Peissant.

Sa tour était équipée de deux cloches en 1608.
Que sont-elles devenues ?

La cloche de l’église de Bersillies.

Landeberte, fondue en 1613, porte la marque de Guillaume Laurent, pasteur à Bersillies à cette époque. C'est elle qui, aujourd'hui encore, nous rappelle les heures, les offices et le glas dans le ciel du village. En effet, sur l'unique cloche de Bersillies aujourd'hui, on peut lire ces inscriptions :

"On me nomme Landeberte,
du peuple seray la trumpete"
M. Guillaume Laurent - Pasteur
M. Miche Regnois
M. Pierre Scept
LAURENTIUS LAURENTI ESTO, 1613 "

La première inscription nous apprend que la cloche a été baptisée " Landeberte " au temps où un certain " M(aître) Guillaume LAURENT était curé de Bersillies-l’Abbaye (1613) La seconde inscription est la devise de ce curé, qui pourrait se traduire en ces termes : " Laurent, demeure Laurent !" ou en bon français, " Laurent, reste fidèle à toi-même " ou encore " Laurent, reste fidèle à ta vie, à ta vocation."
Ces devises de prêtres étaient, semble-t-il, assez fréquentes à cette époque où l'on pouvait lire des slogans tels que " Deviens ce que tu es ! " ou " Réalise-toi pleinement ! "

De 1696 à 1712, l’église fut desservie par l’abbé Ignace Leroy qui fut remplacé de 1712 à 1721 par l’abbé Louis Cambier. En 1716, les religieux de l’abbaye de Maroilles, à la suite d’un procès par lequel maître Louis Cambier, pasteur du lieu, voulait les contraindre à la réparation du chœur de l'église, renoncèrent à leur droit de collation, afin d'être désormais exempts de toute réparation de ce genre. Depuis cette époque jusqu'à la révolution française, les desservants de la paroisse de Bersillies furent choisis par le vicariat de Cambrai parmi les gradués de l'université de Louvain.
A cette époque en effet, la paroisse de Bersillies-l’Abbaye dépendait du Diocèse de Cambrai et du Décanat de Maubeuge jusqu’au concordat de 1801 qui la confia au doyenné de Merbes-le-Château puis dans le Diocèse de Tournai au Décanat de Solre-sur-Sambre (en 1922) Cette église fut remplacée, en 1777-1778, par une construction de style semi-classique de laquelle nous avons une description très détaillée donnée par Théodore Bernier dans sa notice sur le village (Bibl. n° 3) ainsi qu'un schéma retrouvé dans les archives de l'église.

 Eglise du XVIII siècle  Plan de l'église du XVIII siècle Elle avait les dimensions d'une chapelle plutôt que celles d'une église : 13,50 mètres en longueur du portail à l'entrée du chœur, et 7,75 mètres de largeur.
Le chœur, d’une profondeur de 8 mètres, était éclairé par quatre fenêtres à plein-cintre et la nef, soutenue par 4 colonnes, avait 3 x 2 verrières. A l’opposé du chœur, se dressait une tour carrée surmontée d’une petite flèche. A sa base, un porche plein cintre s’ouvrait sur une seule porte.
En entrant, à gauche, se trouvaient les fonts baptismaux, à droite une porte menant à la tour, agrémentée d’une ou deux cloches ( ?) Le maître-autel en bois, orné d’un retable (devant d’autel ou antependium décrit plus loin) existant encore actuellement était surmonté d’une peinture représentant le Christ sur la croix.
Ce tableau a beaucoup souffert des injures du temps; il n'était pas sans mérite et représentait, semble-t-il, un épisode de la vie de saint François de Paule. A gauche, à l’avant du chœur, se dressait l’autel de Sainte Anne surmonté du seul vitrail de l’église offert par les confréries de Leernes et à droite contre le mur de l’avant chœur était placée la statue de Notre Dame, habillée d’un manteau rouge.

En 1783, Joseph Leblond, curé de la paroisse de 1782 à 1803, agrandit le chœur; en témoigne une pierre portant le chronogramme suivant :

MagIster LeonarDUs
JosephUs LebLon
Pastor Vester
ConstrUXIt

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L’Antependium

ou Devant d’autel de l’église de Bersillies-l’Abbaye

:

Dans sa notice écrite en 1880 et précédant la copie du besogné de Bersillies-l’Abbaye, Théodore BERNIER cite, à propos de l’église de Bersillies :

" Le devant du maître-autel est un bas-relief en bois richement sculpté et qui n'a certainement pas été fait pour la modeste église qu’il décore aujourd'hui. Il a 2 mètres 80 centimètres de longueur sur 80 centimètres de hauteur, et est partagé sur la longueur en deux parties, par une moulure.
Copyright A.C.L. Bruxelles n° 91.875

antependium

Au centre de la partie supérieure, on remarque la moitié d’un écusson sur lequel ressort un oiseau; dans l'épaisseur de la section de l'écusson sort une main tenant un calice

détail antependium détail antependium
détail antependium détail antependium
détail antependium détail antependium

Il faut noter que, depuis sa restauration par l'atelier de l'I.R.P.A. à Bruxelles, cette pièce contenant la main et le calice a été remise à sa place sur le côté gauche de la partie supérieure) . Une crosse abbatiale est posée en sautoir derrière ces motifs. Les deux autres côtés de la frise sont remplis par des rinceaux profondément fouillés, semés d'anges et de têtes d'anges. Cette section a 25 centimètres de hauteur. Dans la partie de dessous, ayant 52 centimètres de hauteur, on voit une draperie supportée par plusieurs anges entourant un médaillon ovale; au centre duquel se trouve le buste d'un homme dont le costume tient le milieu entre un noble et un dignitaire ecclésiastique ; de chaque côté de la draperie sort un rinceau richement orné. Le tout constitue une œuvre remarquable de la fin du XVIe siècle. On croit que ce beau travail provient de l’abbaye de Saint Ghislain d'où il aurait été enlevé en 1798 ".
Il faut se rappeler à ce propos que l'Abbaye de St Ghislain (Celle) possédait un fief à Bersillies-l'Abbaye.°>

Le 17 septembre 1899, un rapport du Conseil de la Fabrique d’église nous apprend qu’avec l’autorisation du ministre de l’Agriculture et des Travaux Publics ainsi que de l’évêque de Tournai il est proposé que " le devant d’autel sera aliéné au mieux des intérêts de la fabrique et vendu au plus offrant … ". Parmi les raisons invoquées on trouve que cette antiquité provenant de l’ancienne église constituerait un " hors d’œuvre " dans l’église actuelle ! La réponse du ministre de la Justice par l’intermédiaire du commissaire d’arrondissement est on ne peut plus claire : " Cet objet a une valeur artistique et archéologique suffisante que pour faire obstacle à ce qu’il soit cédé à un particulier ".

Un siècle plus tard, la même fabrique d’église a décidé sa restauration et en février de l'an 2001 cette oeuvre superbement restaurée par les ateliers de l'I.R.P.A. a Cinquantenaire à Bruxelles, peut enfin réintégrer sa place dans l'église et rendre à Bersillies-l’Abbaye une pièce majeure et rare de son patrimoine.

De l'église semi-classique à l'église néo-gothique actuelle.

On connait les circonstances qui ont amené la destruction de l'église semi-classique de 1778. Le bureau des marguilliers de la fabrique d’église, sous la présidence de Constant Mahieu, rapporte en sa séance du 1 avril 1888, la présence d’une lettre émanant du commissaire d’arrondissement de Thuin, datée du 9 mars précédent, dans laquelle il est question de l’arrachement de 2 fenêtres de l’église au cours d’un ouragan survenu dans la région.
En 1893, ces mêmes rapports font état d’importants dégâts sur la façade longeant le chemin de Cousolre, dans le cimetière entourant l’église, au plafonnage à l’intérieur de l’église dont des " placards " se sont détachés, dans la sacristie et au presbytère dont les murs de clôture se sont écroulés … bref, l’église est dans un état pitoyable. Elle le restera jusqu’en 1894 (!), date à laquelle on prend connaissance des plans de la nouvelle église.

L'église néo-gothique actuelle

C'est sous l'autorité du bourgmestre Pierre MAHIEU,élu en 1891, et de son conseil communal formé des échevins Eloi GOBLED et Hilarion PREVOST et de son secrétaire Xavier GÉRARD, que furent prises, sur base de l'approbation des plans élaborés en 1892, les décisions de créer un nouveau cimetière à la rue de Montignies, ce qui fut réalisé le 4 janvier 1894, et de confier aux entrepreneurs JANET Frères non seulement la construction d'une nouvelle église selon les plans de l’architecte C. Sonneville, d'une nouvelle cure et d'un hôtel communal,intégrant les écoles et les logements des professeurs. Ce fut, à l'échelle du village, un projet d'aménagement grandiose qui fut mené au pas de course. Dès le déménagement du cimetière dans son emplacement actuel, l'ancienne église nèo-classique quasiment en ruine fut démolie en 1895, date à laquelle fut érigée au même emplacement l’église actuelle néo-gothique, grâce aux générosités de Marie GÉRARD qui fit un don de 100.000 francs en titres de cette époque.
La nouvelle église fut ainsi construite la même année et consacrée en septembre 1896 sous le pastorat de Monsieur le curé Jules Lefèbvre. Son autel actuel, en marbre blanc, pourrait provenir des marbriers de Cousolre (Emile Quertin ?) mais nous n'en avons pas eu confirmation jusqu'à présent.

L'autel

Quelques autres pièces remarquables font partie du petit inventaire de cette modeste église. Ce sont notamment quelques pièces en étain, les burettes et un plateau, un ostensoir en fer argenté, et un confessional démontable dont la grille, sculptée en plein chêne, est un beau travail d'artiste. Les Burettes L'ostensoir
Le cconfessional

Le presbytère date de la même époque ainsi que l'Hôtel communal construit sous le mayorat de Pierre Mahieu, bourgmestre en 1880 et grand-père d'André Mairiaux qui, nommé en 1971, fut le dernier bourgmestre de la commune de Bersillies-l'Abbaye.

La garenne Il y avait à Bersillies-l’Abbaye, au lieu-dit " Les bosquets de la cure " (actuellement le clos du bosquet) une garenne à lapin, plantée de haies et très colonisée par ce gibier. Bien qu’appartenant aux de Croÿ, cette garenne d’un hectare et demi fut appropriée par le curé qui y coupait du bois avec l’assentiment du mayeur et des échevins, nonobstant les rares visites hivernales qu’y faisaient parfois deux jeunes prêtres et deux gentilshommes de la ville de Beaumont.

Le curé prélevait aussi le droit de pêche dans la rivière : en font foi plusieurs attestations délivrées en 1766, lorsque le prévôt de Beaumont voulut lui contester ce droit. Il faut noter cependant qu’à l’époque du besogné (1608) ce droit revenait aux Seigneurs de Croÿ :

Pescheries.
Son Excellence at par toute la rivière dudit Berseillies, venant de Frasies, sy bas, sy hault et large qu'elle s'extend audit lieu, le droit de pescherie, en laquelle se prend poissons, truictes, grandelius et escrevisces, qui se donne aussy en ferme et en rend-on présentement . . . . . . . XXX lib.

Chaque année, à la Saint Remi (15 janvier), se prélevait le droit de Bourgeoisie : chaque habitant de Bersillies devait présenter au châtelain 18 deniers, une poule et un pain. Les fermiers et laboureurs payaient également 18 deniers par charrue.
Chaque bourgeois du lieu payait à la même date l’équivalent de deux setiers (stiers en wallon : unité de mesure d'avoine correspondant à 29,24 litres ou 4 quartiers : 4x 7,31 litres) , un quartier et trois pintes (= 0,888 litre), suivant la mesure de Beaumont, en avoine.
Cela se passait généralement en présence du mayeur dans une ferme.
De même, plusieurs fois par an, pendant la semaine sainte, à Pâques et à Noël, des prédicateurs, nourris et hébergés par le curé, payés par la communauté, venaient prêcher pendant les offices. Ils faisaient partie des Carmes venant de Valenciennes ou des Jacobins d’Avesnes. Deux quêtes par an leur étaient réservées, une à Noël pour " chair et grains ", l’autre en mai pour beurre et laine ". (Bibl. n°23)


Vitraux du choeur
Au XVIIe siècle, Saint Martin, représenté ici à gauche dans le tryptique des vitraux du choeur, se fêtait les 11 novembre et 4 juillet et Sainte Barbe, figurant à droite dans le tryptique, le 4 décembre.
Mais la fête principale est déjà fixée au premier dimanche du mois d’août au lendemain duquel se fêtait également le jour de la bénédiction de Sainte Barbe.
La table des pauvres, dite du saint Esprit, possédait déjà au XVe siècle des rentes et quelques héritages; l'administration de ces biens était confiée à un manbour nommé par le curé, le mayeur et les échevins de Bersillies-l'Abbaye. Ce manbour leur rendait compte tous les trois ans de sa gestion; il devait faire des distributions aux pauvres, chaque année le jour de la fête de saint Thomas (3 juillet). A l'époque du besogné, il n'y avait pas d'hotellerie dans le village si ce n'est une seule taverne appartenant à Robert Michelet et qui, apparemment, n'offrait aucun confort: "ni enseigne, ni commodité pour y loger les chevaux des attelages". Quand on sait qu'au début du XXe siècle on comptait environ 80 cafés et qu'il fallut une ordonnance pour tempérer la profusion de débits de boissons, il est possible de mesurer l'évolution de la vie du village durant ces trois siècles.

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Les ermitages de Bersillies.

De tout temps, des ermitages se sont implantés pour un certain temps dans la campagne environnante et Bersillies-l’Abbaye ne fait pas exception à la règle. Le récit qui suit a été écrit en 1882, par Théodore Bernier qui, à l’occasion d’une excursion au départ de Solre-sur-Sambre, était parti à la découverte de ces ermitages.
Il décrit avec beaucoup de précision celui qui fut occupé par Arsène Buisseret à Solre-sur-Sambre en 1657-1658. La narration est d’une telle poésie qu’il serait dommage de ne pas la transcrire ici textuellement.

"Ayant ouï-dire que des vestiges de deux autres ermitages se voyaient encore aux environs de Beaumont, dans les bois de Solre-sur-Sambre et de Bersillies-l'Abbaye, nous résolûmes de nous en assurer. Dans ce but, par une belle matinée de l'été dernier nous descendions à la gare de Solre-sur-Sambre et prenions immédiatement la route de Bersillies, non sans jeter, toutefois, un rapide coup d’œil sur le château féodal des comtes de Mérode-Trélon, dont le vénérable donjon, tant de fois séculaire, flanqué de ses vieilles tours cylindriques, couronnées encore de leurs mâchicoulis, semble se rire des outrages du temps. Un quart d'heure plus tard, nous traversions l'emplacement de l'ex-abbaye de la Thure, dont il ne reste plus guère que la vieille muraille d'enceinte, dans laquelle la route fait une énorme brèche et pénètre ensuite dans le sombre vallon, profondément encaissé entre de hautes collines boisées, qui sert de lit aux eaux de la Thure.
Celles-ci, tantôt paisibles, tantôt rageuses et écumantes, coulent presque parallèlement à la nouvelle route. Au sortir des bois, le gracieux village de Bersillies, apparaissant tout à coup de la façon la plus pittoresque, nous offre un spectacle d'autant plus ravissant qu'il est inattendu.

Parvenus au presbytère, nous mettons immédiatement à contribution l'extrême obligeance de Monsieur l'abbé Lefèvre, révérend pasteur de l'endroit, en compulsant avec son secours les vieilles archives de la paroisse, dans l'espoir d'y trouver la mention de quelque ermite. L'examen des registres aux décès ne nous ayant rien appris, nous commencions a désespérer du succès de nos recherches, lorsqu'en parcourant une farde intitulée : " Déclaration des obits fondées dans l'église paroissiale de Bersillies … " nous trouvons au numéro 46, la mention suivante, remontant au commencement du dix-septième siècle :

Les quatrièmes obits suivants de quatre tems, sont trois de frère Martin Lefèvre et … ". Tel fut le très maigre résultat de nos fastidieuses perquisitions.
Il y avait donc, semble-t-il, d'après cela, au XVIIe siècle, un ermite à Bersillies du nom de frère Martin Lefèvre. D'autre part, d'après un document très authentique, intitulé : " Statuta diocesis Cameracensis ", au siècle suivant l'ermitage n'était plus habité.
Il nous fallait maintenant déterminer l'emplacement exact de cet ermitage. Monsieur Gérard, secrétaire communal et numismate bien connu, se chargea très obligeamment de nous y conduire.

Sortant du village, dans la direction du Nord-Ouest, nous arrivons bientôt aux Viviers, situés a cinq cents mètres de l'église, c'est-à-dire à mi-chemin de l'ermitage. Il est à remarquer que c'est sur ce vivier qu'était fondé l'obit de frère Martin.
Sautant alors le ruisseau, nous faisons sous la feuillée l'ascension de la colline boisée dite Bois communal de Bersillies. Arrivé à un sentier séparant ce bois de celui de Branleux et servant de frontière entre la France et la Belgique, notre guide fait deux pas dans le fourré et nous appelle. Il nous montre alors une excavation assez petite, entourée de quelques débris grossiers de maçonnerie tout à fait primitive, en disant : " C'est ici ! " Nous avouons franchement que nous ne l'eussions pas soupçonné, tant il reste peu de chose de l'ermitage. Une source se trouve à proximité. Cet endroit s'appelle encore, en style administratif, " la Taille de l’ermitage. "

Le suite du récit concerne un second ermitage situé à quelque distance du premier sur le territoire de Solre-sur-Sambre.
Restait à présent à remplir la seconde partie de notre programme, c'est-à-dire, la visite de l'ermitage de Solre-sur-Sambre. Franchissant, non sans quelques égratignures, le ravin qui sépare le bois communal de Bersillies de celui de Solre, nous traversons ce dernier en obliquant vers le Nord-Est. Laissant sur notre gauche un certain tumulus gaulois ou romain, de peu d'importance, découvert par M. Gérard, en 1876, nous descendons dans un second ravin, dit Ravin de la Précelle et, au sortir de là, nous atteignons enfin un petit bosquet de sapins où fut trouvé, il y a quelques années, un crucifix en or massif, qui est actuellement, dit-on, en la possession de la famille de Mérode-Trelon, propriétaire du sol.

" Encore quelques pas, nous dit notre complaisant cicerone, et nous serons à l'Ermitage de Solre. "

Il était temps, car nous étions tout en nage et rompus de fatigue, après cette odyssée par monts et par vaux. Cependant nous avions beau piétiner sur place, dans tous les sens, l'ermitage restait introuvable. Nous tournions évidemment dans un cercle vicieux. Notre guide, presque découragé, nous prie alors de le laisser chercher seul. Peu après, il revient enfin, tout rayonnant, nous annoncer l'heureuse nouvelle : l'ermitage était découvert !
Approchant de l'endroit indiqué, nous apercevons dans un fourré inextricable, une assez grande voûte en plein cintre, mesurant environ cinq mètres de diamètre et entourée de nombreux débris informes. C'est ce qu'on nomme dans le pays la Cave de l'Ermite. Quant à l'ermitage lui-même, il s'appelle l'ermitage du bois de la Précelle, du nom de la parcelle boisée où il se trouve. Il nous a été impossible de découvrir le nom des ermites qui l'ont habité, par suite de l'incendie des registres paroissiaux antérieurs à 1734, date à laquelle le presbytère de Solre a été consumé par le feu avec tout ce qu'il renfermait. Le document, dont nous avons parlé plus haut, y renseigne bien un ermite, au commencement du dix-huitième siècle, mais sans le nommer.

Depuis ce récit qui date de 1882, on sait Mr Léopold Devillers, archiviste de l'état à Mons, que cet ermite s'appelait Arsène Buisseret, qu'il s'était bien comporté et qu'il avait occupé cet ermitage durant 19 mois, échus le 4 février 1658.


L'ermitage de Solre-sur-Sambre n'est distant des ruines de la Thure que d'une dizaine de minutes. Il est, en outre, très voisin d'une autre construction ou excavation située un peu plus au Nord et connue sous le nom de Cave de la Closière des Nonnettes. Enfin, si l'on descend de l'ermitage en ligne droite vers l'Est, c'est-à-dire vers la rivière de la Thure, on remarque sur la rive gauche de celle-ci une solide charpente en bois, mise à découvert lors du percement de la nouvelle route et de la construction du pont voisin. Elle semble avoir eu pour destination de servir de puisard à l'ermite du bois de la Précelle. Ce puisard, situé à peine à deux cents pas de l'ermitage de la Précelle, pourrait servir de point de repère aux amateurs pour trouver celui-ci.

En résumé, comme on le voit, nous connaissons peu de choses sur ces ermitages. Nous espérons, du moins, en avoir facilité la visite aux touristes. C'est, en effet, une des meilleures excursions qu’un amant de la sauvage nature puisse jamais rêver, surtout s'il n'est pas rempli de la crainte des ronces."

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