Quatrième partie : Bersillies au XVIIIème Siècle.
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Bersillies au XVIIIe siècle.

Le développement du réseau routier

La route Bruxelles-Mons date de 1704, celle de Mons-Ath de 1734 et 4 ans plus tard on construisit d'une part la route Ath-Leuze-Tournai et on entreprit l'amélioration et l'extension de l'ancienne chaussée romaine Mons-Boussu entre Mons et Valenciennes.

En 1757 fut construite la route Mons-Beaumont-Chimay en évitant d'y inclure Binche pour ne pas favoriser le commerce du charbon notamment vers Liège et la région du Centre.
Le tracé Mons-Beaumont fut construit vraisemblablement entre 1665 et 1675, d'après C.Poncelet. Ce segment apparaît sur les cartes du traité de Rijswijk.

En 1769, la région de Wasmes obtient la liaison de son charbonnage à la route de Mons-Valenciennes tandis qu'en 1777, les charbonnages de l'est de Mons sont reliés à la route Mons-Bruxelles par Houdeng et Le Roeulx.
Ce n'est qu'en 1780 que fut entreprise la construction de l'axe Mons-Gand-Bruges et Ostende reliant Mons à la mer du nord.
La route de la Croix-Perpêtre, de Beaumont à la frontière française en passant par Leugnies et vers Cousolre fut construite beaucoup plus tard, de 1828 à 1859.

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Qu'en est-il à Bersillies pendant cette époque ?

Carte de fERRARIS

Dessinée et peinte à la main en 1776, la carte de Ferraris ne néglige pas certains détails et sa précision est impressionnante quand il s'agit de dessiner des prés, des vergers, des potagers. Mais à Bersillies, on ne retrouve pas tous les chemins et tous les sentiers signalés dans le besogné. Cela n'a rien d'étonnant si on prend en considération qu le siècle et demi qui sépare ces deux repaires a vu un très fort développement du secteur secondaire. Plusieurs chemins ont été effacés par les labours.

Carte de Bersillies

Depuis sa description en 1608, il a conservé ses six Rues dites "carrossables" : la Grand'rue, traversant le village et parfois dénommée Rue de l'église, la rue de Cousolre menant à Cousolre, la rue du Moulin et la rue du Burge, rebaptisée aujourd'hui Rue du Rosaire, les ruelles du Terne et du Chemineau.
Les autres voies, généralement "non carrossables" sont appelées Chemins. On y trouve les chemins de Langelies (vers Beaumont), de Montignies (vers Montignies-St-Christophe par Bousignies-sur-roc), de Cousolre, de Maufrère (actuelle Rue de l'Esquevée), de Maubeuge (Rue de Colleret), de Cauce (vers Jeumont et Solre sur Sambre) du Bois de la Ville (vers le bois de Bersillies), et le chemin des vaches (Rue Reine Elisabeth) allant au bois de la Houssière.
Enfin, quelques piedsentes, (pissintes ou piessentes), sont des Sentiers menant aux pâtures, souvent délimités par deux charmes dont la plantation trop rapprochée donne un très bel aspect d'éventail.

piedsente

Il existe de nombreux exemples de piedsentes à Bersillies-l'Abbaye et dans ses environs. Entre ces deux charmes, on plaçait généralement une grosse pierre qui s'opposait au passage du bétail.

Il faut souligner à la décharge de ces artistes que Bersillies-l'Abbaye est souvent appelé ironiquement, depuis que Roger Foulon l'a baptisé ainsi," le village où les chemins ne mènent nulle part ! ", ce qui traduit bien évidemment la situation à la fois excentrique et frontalière du village, enclavé en terre française. Et cependant, les limites du village de Bersillies-l'Abbaye ont été fixées avec une très grande précision dans un document intitulé"Séparation et Désoivre du territoire du dit Village de Bersillies-l'Abbaye, contre les seigneuries voisines" accompagnant Le Besogné, document établi et signé le 24 juin 1608. Ont signé ce document les mayeurs, échevins et manants des "villages" de Bersillies-l'Abbaye (Jean WIART,Thomas MARTIN, Andrieu MARMIGNON, Nicolas SIMON et Gilles GRAVET, Robert MICHELET et Sacré WAROQUIER) les échevins de Cousolre (Jean MOQUAUX et Abraham WILLOT, Benoît LEFEVRE et Gilles FAUVERSIENNE, de Bouzignies, François BRUNEBARBE et Jean COMPAGNIE, de Solre-sur-Sambre, Pierre PARIS, Ustache DUQUESNE et Jean LEDOUX, de Marpent, Augustin PAYEN, Anthoine LERMINIAUX et Bartholomé BOMBLED de Colleret). Parmi ceux-ci 20 ont apposé leur signature au bas de ce document fixant définitivement les limites de la commune qui n'ont plus guère varié depuis cette date jusqu'à la fusion des communes le 1/01/1977.

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Notre région à l'époque de la terreur

Le récit qui suit est largement inspiré d'un compte rendu des événements vus du côté français. Tous ces faits d'armes se sont produits dans un rayon de deux dizaines de kilomètres autour de Bersillies-l'Abbaye qui, à cette époque, vivait sous le régime autrichien.

Les 15 et 16 octobre 1793, les français remportent la victoire à la bataille de Wattignies , située à 12 kilomètres à vol d'oiseau de Bersillies-l'Abbaye et qui depuis cette époque prend le nom de Wattignies la victoire. Par ce combat les Français sauvent la ville de Maubeuge menacée par les armées coalisées cantonnées entre l'Escaut et la Sambre et dont 20.000 hommes avaient investi la place fortifiée de Beaumont.

Pendant l'hiver 1793-1794, les français recrutent sur place des soldats en quantité et campent à Dourlers en laissant une garnison de 12.000 hommes à Maubeuge pour la défendre.

Le 2 avril 1794, les français attaquent les avant-postes des autrichiens installés dans la ferme de Gérard Croix à Bousignies-sur-roc. Dans la plaine de Monceau à Cousolre, les combats sont acharnés et l'issue reste très indécise quand soudain, un renfort de Dragons français venant de Colleret se pointe à l'horizon. Les autrichiens sont forcés de se replier vers Beaumont qu'ils occupaient depuis le 28 novembre 1793 et, avant d'abandonner la place, incendient la ferme de Gérard Croix. Talonnés par les français, ils sont contraints d'abandonner dans la côte vers Comagne 14 des leurs dont les squelettes ne furent découverts qu'en 1878, à l'occasion de travaux d'aménagement du chemin vicinal de Bousignies. Ce sont les boutons de leurs uniformes autrichiens qui ont permis leur identification.

Parti de Philippeville le 26 avril 1794, Charbonnier bouscule les autrichiens à Boussu tandis que Desjardins, parti de Maubeuge, traversant Cousolre, culbute ceux-ci à Chaudeville près de Beaumont. Après ces deux combats, les autrichiens ne peuvent empêcher la liaison des deux armées françaises et se replient sur leur camp retranché de Hantes-Wihéries et de Rouveroy, sous la protection de leur garnison cantonnée à Merbes-le-Château.
Le contractuel LEBAS Devant la tournure des événements, le Comité de Salut public de Paris envoie sur le théâtre des opérations Saint Just et Lebas, tous deux âgés de 24 ans, que leur farouche patriotisme faisait redouter partout où ils apparaissaient.

Le passage de la Sambre fut fixé au 10 mai.
Les autrichiens occupaient la rive gauche de la rivière, de Maubeuge à Charles-sur-Sambre (Charleroi) avec les postes avancés et fortifiés de Bettignies et de Grand Reng, ainsi que des retranchements à Haulchin et Rouveroy. L'armée française occupait sur la rive droite une ligne allant de Maubeuge à Philippeville et s'appuyait sur les camps retranchés de Beaumont et de Boussu. Alors qu'ils pouvaient tout espérer de généraux tels que Marceau, Kléber, Ney, Bernadotte, Duhamel, Scherer et Vézu, rompus à de tels combats, les français subirent les désagréments d'un pouvoir autoritaire et illimité, donné aux conventuels parisiens chargés de les contrôler. Si Charbonnier et Desjardins, intrépides et braves jusqu'à la témérité, pouvaient conduire leurs soldats jusqu'au milieu des troupes ennemies, ils n'avaient pas, semble-t-il, beaucoup de notions de stratégie et étaient incapables, en cas de difficultés, de combiner un mouvement de retrait cohérent qui eut permis de limiter les pertes humaines.
Quoiqu'il en soit, l'offensive fixée au 10 mai 1794 eut lieu comme prévu. Toute l'armée française, de Maubeuge à Philippeville se mit en branle dès 4 heures du matin. Chaque colonne fut dirigée sur un pont de la Sambre avec mission de le traverser. Les résultats furent étonnants.
Parti le premier de Boussu, Marceau arrive le premier à Thuin qu'il emporte d'assaut dans la foulée. Duhem, parti en avant-garde vers Lobbes, passe la Sambre et chasse les autrichiens qui occupaient l'abbaye et s'y installe en attendant la suite des opérations. Favereau quitte Maubeuge, occupe Marpent puis Jeumont. Il est rejoint par Fromentin et Desjardins et, ensemble, ils repoussent les autrichiens dont une partie repasse la rivière tandis que l'autre rejoint le camp de Hantes-Wihéries.
Le premier soir de l'offensive, le bilan apparaît positif pour les français: ils campent sur les rives de la Sambre de Solre jusqu'à Thuin et tiennent les ponts de Lobbes, d'Aulne, de Landelies et de Thuin.
Il fallait compléter ce mouvement par la conquête des rives de la Sambre, de Solre à Maubeuge. Un grand mouvement fut tenté le 12 mai:
Favereau investit le village d'Assevent et, par ce mouvement, il attire vers lui les autrichiens qui dégarnissent leur camp de Merbes-le-Château. C'est ce qu'attendaient Duhem, Mayer et Fromentin pour attaquer Merbes, tandis que Muller et Despeaux se ruent sur Hantes-Wihéries dont ils chassent les autrichiens. Ceux-ci parviennent cependant à traverser la Sambre sur des ponts volants de La Buissière et Fontaine-Valmont. C'était à ce stade de la bataille un triomphe pour les troupes françaises qui réparaient bien des erreurs de stratégies par la bravoure et l'ardeur de leurs jeunes combattants. Malheureusement, ils ne purent conserver des positions si vaillamment conquises!

Le 13 mai 1794, le prince de Kaunitz reçut des renforts et imagina des plans visant à repousser les armées françaises. Alors que Despeaux et Muller emportés par leur élan attaquent les positions autrichiennes de Grand Reng, Duhem et Fromentin, appuyés par de la cavalerie, se portent à Croix et Rouveroy. Mayer, qui la veille avait fini par investir Merbes, s'attaqua à la place forte de Binche en contournant le camp d'Haulchin.  St Just C'est alors que les autrichiens, soutenus par des réserves qui appuient leurs arrières, foncent sur les français et, empêchant leur regroupement, les mettent en déroute et les refoulent sans ménagement vers la Sambre. Cette retraite, confuse et précipitée, avait montré la faiblesse de troupes composées de jeunes recrues.

Saint Just et Lebas, qui avaient assisté au passage de la Sambre et à la retraite du 13 mai, réunirent le 16 mai 1794 au quartier général de Cousolre, un conseil de guerre mémorable auquel assistaient les plus brillants généraux français de l'époque, à savoir: les généraux Charbonnier, Desjardins, Duhem, Favereau, Fromentin, d'Hautpoul, Kléber, Mayer, Marceau, Schérer, Solland et Vézu.

Saint-Just s'éleva avec force contre les actes d'indiscipline commis par quelques bataillons de recrues (et dont il avait été témoin) dans la retraite du 13; il blâma énergiquement la conduite de certains autres qui, s'étant laissés aller à une terreur panique, avaient jeté le désordre dans le passage de la Sambre. Enfin, il donna aux généraux les ordres les plus sévères pour réprimer toute atteinte portée à la discipline ou à la bonne organisation de l'armée. Pour appuyer ces recommandations, il rédigea séance tenante une proclamation qu'une ordonnance à cheval porta immédiatement à l'imprimerie Lévecque, à Maubeuge, avec ordre d'en imprimer 50.000 exemplaires dans les 24 heures sous peine d'être fusillé ! Saint-Just voulait que chaque soldat eût le sien.

"PROCLAMATION

Des Représentans du Peuple à l'Armée Du Nord.

SOLDATS,

Nous vous rappelons à la discipline rigoureuse qui seule peut vous faire vaincre & qui épargne votre sang ; il s'est glissé des abus parmi vous, nous avons résolu de les réprimer. Ceux qui provoqueront l'infanterie à se débander devant la cavalerie ennemie,
ceux qui sortiront de la ligne avant le combat, pendant le combat, pendant la retraite, seront arrêtés sur l'heure et punis de mort.
Tous les cantonnemens feront des patrouilles, elles reconnoîtront tous les militaires errans et les arrêteront et s'ils fuient, elles feront feu.

Soldats,


Nous vous rendrons justice, nous punirons ceux qui vous l'auront refusé , nous partagerons vos travaux mais quiconque s'écartera de son devoir sera frappé d'une mort prompte.
Méprisez l'ennemi qui est devant vous, un tyran imbécile les soudoye ; il n'a qu'un trône, le jouet de la victoire et la victoire vous conduit.
A Cousolre le 27 Floréal an 2 de la république.
Les Représantans du peuple,
St. JUST, LEBAS."

Le Conseil de guerre se tint dans une salle basse de la maison de la rue de Maubeuge à Cousolre qui porte sur sa façade une plaque commémorative portant l'inscription suivante:

Dans cette maison où logeaient les conventionnels
St JUST et LEBAS, le quartier général de l'armée du nord étant à Cousolre,
eut lieu, le 27 Floréal an II (16 mai 1794),
un conseil de guerre auquel assistèrent les généraux
CHARBONNIER, DESPEAUX, DUHEM, FAVEREAU, FROMENTIN, D'HAUTPOUL,
KLÉBER, MAYER, MARCEAU, CHERER, SOLAND, VÉZU, etc.
C'est à la suite de ce conseil que St JUST et LEBAS adressèrent à l'armée du nord
une proclamation devenue célèbre.


Inaugurée par le Conseil Municipal, le 17 mai 1891.

Le conseil de guerre avait fixé la reprise des hostilités au 20 mai. Après des alternatives de succès et de revers - les français furent successivement refoulés quatre fois sur la rive droite de la Sambre - l'armée de Sambre-et-Meuse s'emparait de Charleroi le 25 juin, et sur cette nouvelle base d'opérations, Jourdan, général en chef, prenait des dispositions qui amenaient le surlendemain (27 juin) la brillante victoire de Fleurus et, par la suite, la conquête de la Belgique.

ballon captif

Le 26 juin 1794, le premier ballon captif de reconnaissance apparut sur les champs de bataille opposant les Français et les Autrichiens. Du haut de son aérostat, le capitaine Coutelle pouvait observer tous les mouvements des troupes et renseigner immédiatement Jourdan, le général en chef des troupes françaises du déplacement des troupes de l'alliance autrichienne allemande et russe

A la suite de ces combats, une grande partie de la Belgique devint française et incluse dans le département de Jemappes, le 86ème département français.
Bersillies-l'Abbaye repassait donc ainsi sous administration française, mais pour vingt ans seulement!
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